23 mai 2008
Apollinaire - Lettre à Lou
le 23 avril 1915
Mon Amour,
Lu et relu ta mignonne petite lettre du 19. Tu es tout près de moi dans mon colombier.
Amour-Roi
Dites-moi !
La si belle
Colombelle
Qu'on appelle
Petite Lou,
Dites, où
Donc est-ell
Et chez qui ?
- Mais, chez Gui
Tu lis des bouquins menottiers, mais tu pourrais au moins dire les titres pour qu'on sache et donner ton jugement sur ce que tu lis. Il y a d'ailleurs beaucoup d'imbecillités. Dis à ma concierge que si elle reçoit des lettres envoyées par le brigadier G. de Kostrowitzky à Monsieur Guillaume Apollinaire, qu'elle te les donne, car pr ne pas multiplier les envoies à toi, je m'en envoie que tu peux décacheter; dans le prochain et premier envoie de ce genre, il y a un journal américain où on a reproduit un de mes poèmes, tu déposeras ces papelards chez moi, simplement. Je ne sais si je me trompemais il me semble que les pauvres poilus de ma pièce sont plus intelligents, les conducteurs aussi bien que les servants. Tu m'a écrit Lou que tu avais bons tuyaux et que nous nous reverrions vite. J'avoue que malgré tout, rien, ma chérie, ne laisse encore supposer cela.
Oh ! La lenteur !
Tu sais que ma méthode, Lou, est d'observer ce qui tombe sous mes sens pour en déduire ce qui est en dehors de mes sensations immédiates. Je crois qu'une petite chose quelle qu'elle soit est si grande qu'elle donne l'image d'une plus grande encore et des plus grandes toujours ou des plus petites encore, à l'infini...
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